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Blog des Amis de LULINGU (RDCongo)
30 janvier 2008

Janvier 2008 - Wazungu wanarudia !

Wazungu wanarudia !
(Les Blancs reviennent !)

Janvier 2008

 C’est par ce cri que trois de nos compatriotes ont été accueillis à Lulingu, à 250 kilomètres au nord de Kasongo, au cœur d’un territoire complètement isolé depuis des années. C’était la 1ère fois depuis 9 ans que le petit avion du P. Denis y atterrissait. Et Lulingu n’est accessible que par avion …  

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Premiers Européens à venir à Lulingu depuis 9 ans, les Visiteurs, emmenés par Alain de Maere, sont l'objet d'une
vive curiosité de la part des enfants. Tout au long du chemin qui relie la piste de brousse de Tshonka à Lulingu (10 km),
les enfants des écoles sont venus faire la haie.

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Accueil devant l'église de Lulingu : selon la coutume, les Mamans expriment leur joie par le chant et par la danse

Ce passage par Lulingu fut le point d’orgue d’un séjour qui avait commencé, classiquement, par Kasongo. Cette fois, le P. Alain de Maere avait emmené avec lui Julien Cloots de l'ASBL Urafiki, jeune ancien chef scout, et son Papa, André de Maere, ancien Administrateur Territorial au Nord Kivu. On devine avec quelle émotion celui-ci a retrouvé le Congo plus de 50 ans après son premier voyage ...  

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Les "pionniers" : Alain de Maere, André de Maere, Julien Cloots
à leur retout de Lulingu, devant la cathédrale de Bukavu
  

C’est à André de Maere qu’on doit le compte-rendu ci-après :  

UNE QUINZAINE MÉMORABLE AU SUD KIVU ET AU MANIEMA  

Alain de MAERE, Curé-Doyen de Braine-l’Alleud, Julien CLOOTS, un jeune ingénieur informaticien et ancien Chef Scout à La Hulpe, Président d’URAFIKI (en français : amitié), une A.S.B.L. s’occupant de projets de développement durable et moi-même, venons de passer un séjour absolument inoubliable entre Noël et le Nouvel-An, dans les provinces du Sud-Kivu et du Maniema, situées dans l’Est de la République Démocratique du Congo. 

Inoubliable en effet, en raison de l’accueil que nous y avons reçu et qui devenait encore plus chaleureux et enthousiaste lorsque mes interlocuteurs apprenaient qu’avant l’indépendance, j’avais été Administrateur Territorial dans divers territoires du Nord-Kivu !  

Notre voyage avait pour but d’intensifier la coopération entre le Diocèse de Kasongo et Urafiki ainsi que les paroisses Saint-Nicolas de La Hulpe et Saint-Etienne de Braine l’Alleud, surtout dans le domaine de l’enseignement, par le biais de la création de bibliothèques pour les écoles diocésaines de Kasongo, l’envoi de nombreux livres pour la paroisse Sainte-Thérèse de Mingana jumelée avec la paroisse Saint-Nicolas de La Hulpe et du jumelage à venir de la paroisse Ste Barbe de Lulingu avec la paroisse St Etienne de Braine-l’Alleud.

Alain et Julien ont également suivi la progression du mouvement scout lancé en juillet 2007 par d’anciens Chefs louveteaux et scouts de La Hulpe à Kasongo. Ils y avaient lancés le scoutisme en commençant par des meutes de louveteaux. Ceux-ci nous attendaient au grand complet, à l’entrée de la ville, lors de notre arrivée à Kasongo et nous ont escortés en chantant jusqu’à la Procure du Diocèse ! Ils nous ont impressionnés par leur enthousiasme et leur sérieux. 

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les Loups de Kasongo
 


Danses avec les Loups par papifef

 Tandis qu’Alain et Julien s’activaient avec les responsables locaux des écoles diocésaines, on me sollicitait de partout pour donner une conférence par-ci, accorder une interview par-là, sur la manière dont fonctionnait ce fameux Service Territorial, qui avait tellement bien administré le Congo jusqu’au 30 juin 1960, qu’il en avait fait une « colonie modèle » !  

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André de Maere interviewé par une radio locale

 Je me suis prêté de bon cœur à ces sollicitations tout en précisant bien chaque fois que mon exposé, illustré de photos d’époque et suivi d’un DVD, serait court afin que tous ceux qui le souhaitaient, aient la possibilité de poser ensuite toutes les questions qu’ils voulaient, sans le moindre tabou ou la moindre restriction. Et j’ai été servi. Invariablement, mon interpellateur rendait d’abord un vibrant hommage à la Belgique pour avoir réussi ce tour de force de faire passer le Congo, un pays pourtant 80 fois plus grand qu’elle, en si peu de temps, à un stade de développement supérieur à tous les autres pays africains.  

Et de rappeler que, du temps des Belges, la population vivait en paix, les voies de communication étaient entretenues et permettaient à tous de circuler et de faire circuler les produits des récoltes et autres marchandises partout en toute sécurité, que l’enseignement et les soins médicaux prodigués jusque dans les coins les plus reculés, étaient gratuits pour tous !  

Mais tout aussi invariablement, suivait alors une critique acerbe sur la manière dont les Belges avaient laissé tomber le Congo après lui avoir accordé beaucoup trop tôt une indépendance à laquelle les Congolais n’avaient pas été préparés ! Une indépendance que seule une minorité de meneurs réclamaient à cor et à cri pour pouvoir se livrer sans contrainte au pillage, à leur seul profit, des richesses que les Belges avaient su tirer du pays et dont tous bénéficiaient.  

Ce que nous voulions, m’ont-ils dit, c’était nous élever dans la hiérarchie coloniale, devenir administrateur territorial, officier, magistrat, agronome, médecin, vétérinaire, directeur de société et au lieu de cela, vous nous avez « balancé l’indépendance » et vous êtes partis !  

Et d’attribuer à ce manque de préparation à se gouverner eux-mêmes, la cause de tous leurs maux, les millions de morts de toutes ces guerres civiles et autres rébellions toujours vivaces et l’incapacité de leur peuple à sortir de l’abîme !  

C’était évidemment un peu court comme raisonnement et je n’ai pas manqué de leur dire qu’il me rappelait furieusement les reproches que certains enfants trop gâtés au cours de leur adolescence font, après avoir réalisé où cela les avait menés, à leurs parents. Coupables selon eux, de leur avoir donné beaucoup trop tôt la liberté de faire tout ce qu’ils voulaient.  

Je leur ai dit aussi que si nous avons donné la préférence à un enseignement destiné à la masse de la population et non réservé à une élite, c’était dans le but de donner des chances égales à tous et de faire progresser l’ensemble des Congolais, pas à pas, étape après étape, du degré primaire au degré secondaire et ensuite au degré universitaire, deux superbes établissements, Lovanium et Elisabethville ayant d’ailleurs délivré leurs premiers diplômes universitaires à la veille de l’indépendance.  

Mais j’ai bien dû reconnaître que nous avons été pris de court et que si nous avions su former aussi des élites, comme le faisait l’Eglise qui dès ses débuts avait eu la sagesse de laisser accéder des africains au sacerdoce, les choses auraient pu évoluer beaucoup plus sereinement.  

En conclusion, leur ai-je dit, les Belges ont certes été d’excellents « gestionnaires » (bruyantes approbations) mais n’ont sans doute pas été assez « visionnaires » (applaudissements) ! Les réunions se terminaient tard et se poursuivaient encore par des conversations en « aparté » au cours desquelles les Congolais me disaient leur espoir de voir les Belges revenir pour que tout « redevienne comme avant » !  

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Tout au long du chemin, la population se presse pour nous accueillir
 

Notre mission se terminait à Lulingu, une région entièrement enclavée qu’on ne peut atteindre que par avion et où on ne peut circuler qu’à pied, à moto ou à vélo. A notre descente d’avion, nous avons été accueillis au bord de la piste tracée en pleine forêt vierge par des centaines de mamas agitant des palmes, des fleurs, dansant et chantant à tue-tête !

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Alleluia des femmes de Lulingu
 

En guise de cadeau de bienvenue : des fruits, des poulets, des canards et même une chèvre! Tout au long des 10 kms qui nous séparaient de l’endroit où nous allions loger, les villageois avaient érigé des arcs de triomphe, les habitants sortaient à notre rencontre avec des cris de joie et des acclamations où revenait ce leitmotiv lancé à pleine voix : « Wazungu wanarudia ! » (Les Blancs reviennent !). Juchés à l’arrière sur les petites motos chinoises qui zigzaguaient d’une ornière à l’autre pour éviter les trous, il fallait bien s’accrocher pour répondre dignement d’un bras puis de l’autre aux vivats qui fusaient de partout !

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les motos-taxis
 

De retour à Bukavu, nous avons encore été interviewés tous les trois par la Télé locale, ravie de l’aubaine de pouvoir présenter à ses téléspectateurs trois Belges, dont l’un (Julien) venait pour la 1ère fois au Congo, l’autre (Alain) y venant régulièrement chaque année et moi, qui y avais vécu avant l’indépendance et qui y avais été administrateur territorial !   

 André de Maere Administrateur de Territoire Honoraire Janvier 2008

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Visite dans la famille de l'Abbé  Justin Sekatera (au centre), ancien vicaire à La Hulpe
et (2008) Chancelier de l'Archidiocèse de Bukavu
 

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Beauté et repos à la Procure de Kasongo à Bukavu


 

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15 janvier 2008

Localisation de Lulingu

Où se trouve Lulingu ?

 

Lulingu est une localité du groupement Bamuguba-Nord, collectivité chefferie de Bakisi en territoire de Shabunda dans la province du Sud-Kivu située à 40 km de Katchungu et 100 Km de Shabunda. Avec les villages tout proches (dans un rayon de 10 km), elle compte environ 35.000 habitants, soit 7.000 ménages. A ceux-ci s'ajoutent les nombreux "déplacés" qui viennent chercher refuge à Lulingu. Le nombre de déplacés est éminemment variable en fonction de l'intensité des troubles que connait la région. La dernière évaluation, faite au début 2012, estimait qu'environ 4.000 ménages (soit +/- 20.000 personnes) s'étaient provisoirement installés à Lulingu. Cet afflux de réfugiés apporte évidemment son lot de difficultés de toutes natures dans les domaines de la santé, de la nutrition, de l'éducation, etc. Tous problèmes que les autorités et habitants de Lulingu sont bien incapables de gérer, eux-mêmes vivant déjà dans des conditions plus que précaires...  

Map_GoogleLulingu, au nord de l'image, se trouve à vol d'oiseau à 150 km de Bukavu, son chef-lieu de province et à 250 km du siège de son diocèse, Kasongo (au sud de l'image). Les bulles vertes localisent les différentes paroisses de ce diocèse.

Aucune route carrossable ne mène à Lulingu, si ce n'est une piste uniquement accessible aux motos/vélos entre Shabunda et Lulingu, avec franchissements d'importantes rivières en pirogue...

La communication depuis Bukavu se fait par avions petits porteurs (généralement des Antonov) qui embarquent quelques passagers en plus des approvisionnements en biens de consommation. Dans le sens Lulingu-Bukavu ou Goma, ces avions emportent toute la production des différents minerais extraits dans les environs.

En raison de la présence de nombreux réfugiés à Lulingu, le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations-Unies envoie un avion par semaine avec des denrées de première nécessité.  

 

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Sur l'image-satellite ci-contre, on a entouré la zone accidentée couverte de forêts primaires, située au Nord de Lulingu et qui sert de refuge à toutes sortes de rebellions. C'est de cette région que proviennent la plupart des réfugiés qui vont s'abriter à Lulingu.

Cette zone est plus grande que la Belgique et comprend aussi les 600.000 hectares de la réserve naturelle de Kahuzi-Biega (deux anciens volcans éteints) où subsistent de nombreuses espèces animales menacées d'extinction, dont les gorilles de plaine.


A droite de l'image on voit deux des Grands Lacs (lac Edouard et lac Kivu) et à gauche, le fleuve Congo. 

Les coordonnées GPS de Lulingu sont : Latitude Sud : 02 20’ 32.7’’/ Longitude Est : 27 36 37.5’’


 

 

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